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La pauvreté, une affaire de femmes ?

Les femmes sont-elles des candidates toutes trouvées pour la pauvreté dans les pays en développement ? C’est une question légitime au vu de la situation de plusieurs d’entre elles. Tout au long de ce dossier, creusez avec nous le sujet de la pauvreté au féminin et découvrez le travail formidable de nos partenaires auprès de ces femmes pauvres et vulnérables, mais aussi courageuses et volontaires.

« La pauvreté est sexiste[1] ! » 

C’est l’affirmation choc d’une campagne de l’ONG One en 2016. Au-delà de simplement chercher à marquer les esprits par une formule qui « claque », l’association voulait faire prendre conscience de la plus grande vulnérabilité des femmes face à la pauvreté

Les chiffres sont là pour appuyer ce constat. Dans un rapport récent d’ONU Femmes, il était annoncé qu’en 2021, 

« pour 100 hommes âgés de 25 à 34 ans vivant dans l’extrême pauvreté (disposant de 1,90 dollar ou moins par jour pour vivre), on comptera 118 femmes. Un écart qui devrait se creuser davantage à 121 femmes pour 100 hommes à l’horizon 2030TEXTE [2]».  

Cette inégalité contribue à ce que certaines ONG spécialisées parlent parfois de la « double peine » subie par les femmes dans les pays en développement : non seulement elles sont nées dans un pays pauvre mais en plus elles sont nées femmes ! Cherchons alors à mieux comprendre ce qui se joue ici. 

Une vulnérabilité accrue à la sous-nutrition 

Lorsque l’on évoque les inégalités entre hommes et femmes en matière de développement, l’un des premiers sujets à aborder – et sûrement l’un des plus importants – est celui de l’alimentation. En effet, bien que la différence ait tendance à s’atténuer progressivement depuis plusieurs années maintenant, les femmes et les enfants restent encore les plus touchés par la faim.  

Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 60 % des personnes sous-alimentées dans le monde sont des femmes[3]. Il y a des raisons à cela, souvent liées à des normes sociales. Dans certaines régions du monde, les pratiques culturelles et traditionnelles peuvent accentuer cette discrimination. En effet, comme les femmes sont souvent responsables de nourrir la famille, elles s’assurent généralement que les autres ont mangé en premier. Il leur arrive alors parfois d’être les dernières à se nourrir ou, lors d’une crise, d’être les premières à se priver de nourriture pour que les autres membres de la famille aient suffisamment à manger. 

Des besoins supérieurs en matière de santé

Si l’espérance de vie à la naissance des femmes est supérieure à celle des hommes, il est à noter néanmoins que celles-ci sont particulièrement vulnérables sur le plan de la santé. Les femmes connaissent en effet une morbidité plus importante et ont davantage recours aux services de soins que les hommes : chaque jour, environ 830 femmes meurent ainsi de causes évitables liées à la grossesse et à l’accouchement[4].  

Doit être évoqué également la vulnérabilité des femmes face à la violence, qu’elle soit en lien avec une brutalité du quotidien ou comme arme de guerre. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Au cours de sa vie, une femme sur trois dans le monde est susceptible de connaître des violences physiques et/ou sexuelles[5]

L’enjeu crucial de l’éducation

En matière de développement, l’une des solutions relativement consensuelles pour essayer d’améliorer les conditions d’existence des populations réside dans l’éducation. Avec un meilleur bagage culturel, les individus sont mieux armés pour faire face aux épreuves de la vie.  

Seulement, dans ce domaine aussi, des inégalités surgissent, puisque les femmes sont les premières affectées par les discriminations et l’analphabétisme. En effet, les deux tiers des 758 millions de personnes illettrées à travers le monde sont des femmes[6]. Différentes raisons peuvent être avancées pour expliquer cette situation.  

Là aussi, les normes sociales entrent en compte. Dans de nombreuses parties du monde, la scolarité des garçons est privilégiée, car ce sont eux qui sont appelés à faire vivre la famille. Le mariage des enfants a également de lourdes conséquences sur leur niveau scolaire et sur celui de leurs progénitures. Or, chaque année, ce sont environ 15 millions de filles qui sont mariées avant l’âge de 18 ans[7]. Sur le plan professionnel, l’éducation est évidemment déterminante. Une femme instruite a plus de probabilités non seulement d’obtenir un emploi, mais aussi que cet emploi soit durable et assorti de bonnes conditions de travail et d’un salaire décent.  

Une aggravation de la situation liée à la Covid-19

La pandémie de Covid-19 a eu tendance à exacerber les situations d’inégalités déjà existantes, de quelque nature qu’elles soient. Les individus et les communautés les plus pauvres ont ainsi été les plus durement affectées. Les femmes paient, quant à elles, le plus lourd tribut à la crise.  

Représentant 67 % du personnel soignant dans le monde[8], elles ont été aux avant-postes durant la pandémie et particulièrement exposées aux risques d’infection. Mais elles ont également été les plus vulnérables sur le plan économique, le chômage ne les ayant pas épargnées. Selon les chiffres de l’Organisation internationale du travail (OIT), la perte d’emplois des femmes a atteint 5 % en 2020, contre 3,9 % chez les hommes[9]. Nombre d’entre elles ont alors dû faire face à la précarité.  

Dans les pays en développement, des études récentes estiment que 47 millions de femmes ont basculé sous le seuil de pauvreté en 2020[10]. L’explication de cette situation tient au fait que les femmes sont majoritaires dans les secteurs les plus touchés par la crise (tourisme, restauration, services) ainsi que dans l’emploi informel et précaire. En effet, en Asie du Sud, ce sont jusqu’à 95 % des femmes qui travaillent dans le secteur informel selon l’Organisation des Nations Unies (ONU)[11]

Tous ces éléments témoignent de la vulnérabilité particulière des femmes en matière de développement et contribuent à donner un « visage féminin » à la pauvreté. Pour y remédier, il est essentiel de mener des projets qui puissent spécifiquement leur venir en aide, en sachant que des investissements en faveur des femmes et des filles bénéficient en fait à tous. 

Pour aller plus loin

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Notes

[1]https://www.one.org/canada/fr/rapports/la-pauvrete-est-sexiste-2016/.
[2]https://www.unwomen.org/fr/news/stories/2020/8/press-release-covid-19-will-widen-poverty-gap-between-women-and-men. [3]https://www.actioncontrelafaim.org/a-la-une/pourquoi-les-femmes-sont-elles-plus-touchees-par-la-sous-nutrition/.
[4]https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/women-s-health .
[5]https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/women-s-health.  
[6]https://www.carefrance.org/actualite/communique-presse-news/2018-02-27,alphabetisation-femmes.htm.  
[7]https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/women-s-health.
[8]https://www.plan-international.fr/droits-des-filles/pourquoi-les-filles/inegalites-barrieres-droits-des-filles. [9]https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/covid-19-les-progres-vers-l-egalite-femme-homme-retardes-d-une-generation-selon-une-etude_4354037.html.
[10]https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/06/05/covid-19-les-femmes-paient-le-plus-lourd-tribut-a-la-crise_6082942_3234.html. [11]https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/06/05/covid-19-les-femmes-paient-le-plus-lourd-tribut-a-la-crise_6082942_3234.html.