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Pourquoi aider son prochain pauvre dans son travail ?

Le SEL soutient des partenaires locaux qui aident des personnes ou des groupes en situation de pauvreté à vivre de leur travail. Comment ? En proposant un appui à leurs activités économiques. Saviez-vous que cela correspond aussi à une vision biblique de la vie humaine ?

On imagine parfois que la Bible enseigne une vision négative du travail. En effet, il est question dans la Genèse de travailler à la sueur de son visage un sol maudit à cause du péché de l’homme. Mais ce n’est là qu’une partie de l’histoire !

En soi, la Bible présente le travail et l’activité économique comme de bonnes choses. Ils permettent aux humains d’obtenir ce dont ils ont besoin pour vivre. Ils sont aussi nécessaires au bien commun de la société.

Mais le péché a bel et bien rendu le travail pénible, souvent frustrant, parfois impossible. L’une des causes de la pauvreté est à chercher dans cet état de fait. Dans un tel contexte, aimer son prochain pauvre, c’est aussi l’aider dans son travail ! C’est d’autant plus vrai que l’œuvre du Christ redonne un horizon d’espérance au travail humain.

La Bible présente une vision fondamentalement positive du travail

Au cours de sa vie humaine sur la terre, Jésus a travaillé ! Il était connu à Nazareth comme « le charpentier » (cf. Marc 6.3). Or ce métier, qui rentre dans la catégorie « artisanat », est bien une activité économique, « génératrice de revenus ». Bien que nous n’ayons pas d’informations sur ces années de sa vie (plus nombreuses que celles de son ministère public), nous pouvons dire qu’elles font partie d’une vie humaine « ordinaire » et « normale ». C’est une chose tout à fait positive que d’être un charpentier !

Le travail humain, auquel Jésus a donc pris part, rentre dans le cadre de la tâche confiée par Dieu à l’humanité au commencement : multiplier, remplir la terre et la soumettre (cf. Genèse 1.28). Il s’agit d’en mettre en valeur (forcément par le travail !) les potentialités pour la gloire de Dieu et le service du prochain.

Le résultat prévisible du travail consiste dans un accroissement des richesses et une amélioration des conditions de vie. « Le bien le plus précieux de l’homme, c’est l’activité. » (Proverbes 12.27) « Celui qui agit d’une main nonchalante s’appauvrit, mais la main des hommes actifs enrichit. » (Proverbes 10.4) Ce n’est certes pas toujours le cas – et il ne faut pas prendre les sentences du livre des Proverbes comme si elles ne connaissaient jamais d’exceptions. Mais la vérité générale demeure et doit nous guider dans notre manière de vivre.

Obtenir ce dont on a besoin pour vivre

La Bible énonce que l’ouvrier mérite son salaire (cf. 1 Timothée 5.18 et Luc 10.7). C’est vrai de ceux qui annoncent l’Évangile, mais aussi de tous ceux qui travaillent. La loi de Moïse incluait une disposition stipulant que les employés devaient être ponctuellement payés (Lévitique 19.13). Le Nouveau Testament fustige les grands propriétaires terriens qui frustrent de leur salaire les ouvriers qui ont moissonné leurs champs (Jacques 5.4).

En effet, le travail sert à obtenir ce dont on a besoin pour vivre. Les Proverbes rappellent que c’est la faim qui pousse à travailler (cf. 16.26). L’apôtre Paul va jusqu’à dire que celui qui ne veut pas travailler ne doit pas manger non plus (2 Thessaloniciens 3.10).

Or dans la plupart des sociétés humaines (et déjà à l’époque de la Bible), c’est l’argent qui est le moyen utilisé pour se procurer les biens et les services dont on a besoin ou envie. Il importe donc que le travail que l’on accomplit permette soit d’obtenir un salaire, soit de dégager des bénéfices grâce au commerce. C’est en effet de cette manière que l’on peut se procurer de quoi satisfaire à ses besoins de base, à ceux des personnes dont on a la charge. Et aussi de partager avec les autres, notamment les pauvres (cf. Éphésiens 4.28).

La chute a déréglé le travail et son efficacité

Si le travail et l’activité économique sont en elles-mêmes des bonnes choses, ils ont été affectés par la chute :

  • Le travail est devenu pénible. Il est maintenant plus difficile d’en tirer de quoi satisfaire à ses besoins (cf. Genèse 3.17-19). Dans certains cas, nous nous retrouvons en situation d’échec avec la perspective du manque et de la pauvreté.
  • Les échanges économiques sont atteints par le péché : orgueil, violence, malhonnêteté les caractérisent souvent. Parfois c’est tout un système économique qui peut être corrompu. La Bible a des enseignements à apporter sur le sujet du commerce.

Aimer son prochain pauvre, c’est aussi l’aider dans son travail

Dans un monde déchu, le travail est un domaine marqué par la souffrance. C’est aussi un lieu où peut se vivre l’amour du prochain.

La loi de Moïse ouvrait des possibilités pour le pauvre de mener une activité lui permettant d’obtenir ce dont il avait besoin pour vivre. On peut penser à la loi sur le grappillage et le glanage en particulier (cf. Lévitique 19.9-10).

Il faut surtout penser à la manière dont le pays de Canaan avait été réparti entre les tribus, avec la loi du Jubilé qui stipulait que chaque famille devait rentrer en possession de son patrimoine tous les 49 ans (Lévitique 25.8-17). Or cette loi n’était pas à proprement parler une loi de redistribution des richesses, mais plutôt une loi de redistribution du moyen de produire des richesses. Donner ou redonner une terre, c’était donner les moyens d’obtenir par son travail ce dont on a besoin pour vivre.

Le théologien mennonite Ron Sider a proposé de dire que l’équivalent d’une loi comme le jubilé pour aujourd’hui serait d’assurer l’accès à l’éducation pour tous. En effet, l’éducation fait aujourd’hui ce que la terre faisait (et fait toujours dans certains contextes) dans l’Israël biblique : elle donne le moyen de travailler et d’obtenir ce dont on a besoin pour vivre.

De manière plus large, des formations, du matériel, de l’équipement, voire des prêts financiers servent aussi à aider celui qui en a besoin à mener une activité génératrice de revenus. C’est précisément ce que les partenaires du SEL font dans le cadre des projets « Impulsion économique ». De cette façon, ils inscrivent leurs efforts dans ce cadre biblique global pour lequel le travail et l’activité économique sont de bonnes choses, mais se vivent parfois difficilement dans un monde déchu.

Conclusion

La Bible se termine par la vision glorieuse de la Nouvelle Jérusalem dans laquelle on apporte la gloire et l’honneur des nations (Apocalypse 21.26, cf. verset 24), c’est-à-dire aussi le fruit du travail humain. Sans la venue de Jésus et sans son retour promis, le travail humain serait marqué du seul sceau de la vanité. Mais avec lui, nous avons une espérance.

Sous le regard de Dieu, même le travail le plus humble en vaut la peine et participe à son projet. Nous ne pouvons pas faire le travail de notre prochain à sa place, mais nous pouvons lui rendre le travail plus facile ou lui offrir la possibilité de travailler en lui ouvrant des portes. C’est l’une des façons privilégiées de l’aimer.

Pour aller plus loin :

 



En savoir plus sur l'auteur
Daniel Hillion
Directeur des études au SEL