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Idée reçue n°22 – « Les cartes du monde donnent une bonne représentation de la planète. »

Chaque semaine, le SEL décrypte une idée reçue sur le développement et la pauvreté. Ce que vous pensiez évident... ne l'est peut-être pas !

Tout au long de l’année, le SEL décrypte une idée reçue sur le développement et la pauvreté. Ce que vous pensiez évident… ne l’est peut-être pas ! Chaque jeudi matin, retrouvez ici cette chronique radio réalisée en collaboration avec Radio Arc-en-Ciel.

Gwladys (Radio Arc-en-Ciel) : Aujourd’hui, on va voyager en quelque sorte puisque l’on va parler des cartes du monde. Pourquoi s’y intéresser ?

Nicolas (SEL) : Parce que les cartes conditionnent la représentation que l’on se fait de l’espace qui nous entoure. Et trop souvent, on pense qu’il n’existe qu’une seule carte du monde. Celle que l’on nous a montré à l’école ou que l’on voit quasiment partout ailleurs. Mais il y en a bien d’autres.

C’est-à-dire. Il existe d’autres manières de représenter le monde ?

Oui. Plusieurs. La représentation cartographique est toujours une affaire de choix. Tout dépend de ce que l’on veut mettre en avant. En Europe, par exemple, on est habitué aux cartes où notre continent est placé au centre. C’est le fruit aussi de notre histoire. Mais si vous allez en Australie, vous verrez des cartes du monde où ce sont eux qui sont au centre.

Ok. Mais pour autant ce ne sont que des changements mineurs qui répondent à des besoins pratiques. On change de perspective mais au fond, c’est une carte du monde qui est la même et qui n’est pas fausse.

Dans ce type de cas, on ne fait que changer de perspective oui. Pour autant, la carte du monde à laquelle on est habitué et qu’on appelle la projection de Mercator est quand même fausse. Elle a tendance en fait à distordre la réalité puisqu’elle a l’inconvénient d’exagérer la taille des terres à mesure que celles-ci sont proches des pôles. C’est ainsi que dans la projection de Mercator, le Groenland semble à peu près faire la même taille que le continent africain alors qu’il est normalement 14 à 15 fois plus petit dans la réalité.

Comment est-ce que l’on peut expliquer cela ? Est-ce qu’on nous aurait « menti » en quelque sorte depuis le début ?

C’est à la fois simple et compliqué. Pour faire simple, la terre est un globe. Du coup, c’est impossible de représenter parfaitement une sphère (qui est en trois dimensions) sur un plan (qui est en deux dimensions). Il y a alors des choix de déformation à faire. Pour faire un peu plus compliqué sinon. On dit que la projection de Mercator est une projection conforme, c’est-à-dire qu’elle conserve les angles mais du coup ça se fait au détriment des surfaces.

Et alors en quelque sorte ça change notre façon de voir le monde. Quelle répercussion ça peut avoir finalement en matière de développement ?

Les cartes traditionnelles ont pour principal défaut de donner une idée erronée des surfaces occupées par les différentes régions du monde, et par conséquent des rapports entre les peuples. L’Afrique, c’est près du quart des terres émergées. C’est aussi grand que les États-Unis, la Chine, l’Inde et une bonne partie de l’Europe additionnés. Seulement, la projection de Mercator n’en rend pas compte. Elle diminue sa taille réelle. Il faut alors regarder du côté de la projection de Peters pour mieux le saisir.

Ça veut dire qu’il existe d’autres projections qui seraient plus fidèles à la réalité ? Pourquoi ne pas les utiliser ?

Projection_PetersLa projection de Peters permet de corriger cette défaillance de la projection de Mercator. Elle donne une idée plus juste de la surface des continents. Mais elle n’est pas parfaite non plus. Elle ne conserve pas les angles, ce qui se traduit par une déformation des continents. Il n’y a donc aucune carte qui puisse donner pleinement satisfaction. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on continue d’utiliser la projection de Mercator. Il faut seulement être conscient de ses limites.

Quel que soit la projection utilisée, il ne faut donc pas oublier que les cartes ne sont que des outils. Des outils bien utiles pour appréhender la réalité mais qui ne sont pas la réalité elle-même.

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